Introduction
La photo de rue suscite de nombreuses questions dont celle du droit à l’image. Dans cet article, je vais tenter d’aborder ce sujet complexe sous l’angle principalement juridique même si le droit à l’image soulève aussi des questions d’ordre social (utilité sociale), artistique (liberté d’expression), culturel (son rapport à l’image) et éthique (valeurs morales).
Je précise que je n’ai pas de formation juridique et que toutes les informations présentées dans cet article sont le fruits de mes nombreuses lectures à ce sujet.
Je vais essayer de simplifier autant que possible mes propos afin qu’ils soient agréables à lire et faciles à comprendre. N’hésitez pas à les compléter en commentaire si vous estimez que j’ai omis des détails importants.
Je précise que cet article concerne uniquement le droit à l’image dans l’espace public français et principalement sur la voie publique en 2023. Etant donné que le droit français est en perpétuelle évolution, s’il devait changer, je ne manquerais pas d’actualiser cet article.
Aspect juridique
La jurisprudence française considère que dans la rue le droit à l’expression artistique prime sur le droit à la vie privée puisque la personne se trouve dans un espace public. Tant que la photographie ne provoque pas un préjudice factuel et démontrable (couple illégitime dont l’image provoque un divorce, personne dans une situation dégradante) et qu’elle n’est pas réalisée à des fins commerciales, son auteur est dans ses droits.
En effet, une affaire datant de 2008 nous éclaire sur cette jurisprudence. Je vous la résume succinctement. Ces informations sont issues du site de l’avocate Joëlle Verbrugge (photographe, blogueuse et juriste spécialisée sur la question du droit à l’image) que vous trouverez ici et qui a d’ailleurs écrit un livre très instructif à ce sujet paru en 2013.
Un photographe (et par ailleurs romancier) François-Marie Banier a publié un livre de photographie intitulé « Perdre la tête » (Editions Gallimard, ISBN 978-2070117543)
Or il se trouve qu’une personne photographiée à son insu et apparaissant dans cet ouvrage n’a pas du tout apprécié de ne pas avoir été consultée avant la publication de ce livre qu’elle résumait en une publication montrant des « marginaux et exclus » et qualifiant l’ouvrage de « musée des horreurs ».
Elle assigna l’éditeur sur le fondement des articles 9 (droit au respect de la vie privée) et 1382 (responsabilité civile extra-contractuelle) du Code Civil.
Déboutée par le Tribunal de Grande Instance, elle a interjeté appel ce qui a amené la Cour d’Appel de Paris à prononcer un arrêt qui paraît important dans ce conflit constant entre les notions de respect de la vie privée et de liberté d’expression.
La Cour a en effet fait primer le principe de liberté d’expression, en considérant que « que ceux qui créent, interprètent, diffusent ou exposent une oeuvre d’art contribuent à l’échange d’idées et d’opinion indispensable à une société démocratique » avant de relever que « le droit à l’image doit céder devant la liberté d’expression chaque fois que l’exercice du premier aurait pour effet de faire arbitrairement obstacle à la liberté de recevoir ou de communiquer des idées qui s’expriment spécialement dans le travail d’un artiste, sauf dans le cas d’une publication contraire à la dignité de la personne ou revêtant pour elle des conséquences d’une particulière gravité » (CA Paris, 05/11/2008, 06/03296, 1. de C. C/Gallimard).
Cette affaire dont l’arrêt de la Cour d’Appel de Paris en 2008 fait jurisprudence est crucial. C’est bien la diffusion d’une image qui peut être sujet à débat mais dans la rue ce n’est jamais la prise de vue. Et pourtant, de nombreuses personnes m’y ont déjà interpellé en m’affirmant que je n’avais pas le droit de les prendre en photo. D’où vient cette méconnaissance ?
Si le droit à l’image des personnes en France parait si mal interprété par le grand public, c’est aussi parce qu’il est à la fois mal défini et très protégé. Sa première apparition remonte à 1803 avec l’inscription de l’article 9 au Code Civil : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. »
Au-delà de la jurisprudence du 5 novembre 2008, plusieurs cas de figure tempèrent l’article 9 depuis longtemps. En effet, si la personne n’est pas reconnaissable, lorsqu’un individu est flou, de dos, dans une foule ou encore à contre-jour, l’autorisation n’est pas nécessaire. Il ne suffit pas que quelqu’un se reconnaisse sur une image parce qu’il se savait présent sur les lieux ce jour-là. Il faut qu’il soit clairement identifiable par un tiers.
S’il s’agit d’une personnalité publique, aucune autorisation n’est nécessaire tant qu’elle est photographiée dans l’exercice de ses fonctions.
S’il s’agit des forces de l’ordre, le sujet est complexe. Je vous invite à consulter les article de Joëlle Verbrugge sur son blog qui vous trouverez ici et là. En résumé, nous pouvons les photographier mais la diffusion des images demeurent compliquées pour différentes raisons surtout depuis une nouvelle proposition de loi déposée en 2020 visant à interdire certaines publications. Rappelons qu’en 2006, Monsieur Sarkozy, alors qu’il était encore Ministre de l’intérieur, avait répondu à la commission nationale de déontologie de la sécurité en ces termes : Il est de jurisprudence constante que le principe de la protection de la vie privée ne s’applique pas aux images et enregistrements effectués sur la voie publique. Les policiers ne peuvent donc pas s’opposer à ce que leurs interventions soient photographiées ou filmées.
Lorsqu’une image est réalisée dans le cas du droit à l’information, l’autorisation n’est pas systématiquement requise. En effet, l’article 9 du Code Civil doit composer avec une seconde loi, celle du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Aussi, une personne photographiée lors d’une manifestation publique ne peut s’opposer à sa diffusion si la photo est utilisées à des fins d’actualité, et qu’elle ne porte pas atteinte à sa dignité, bien sûr.
Dans le cas d’une utilisation commerciale, il est incontournable d’obtenir une autorisation écrite de la personne spécifiant les modes de diffusions. Sans cela, le plaignant a quasiment toujours raison.
Dans le cas des images d’enfants, il faut l’autorisation écrite des deux parents tant que la personne concernée par le droit à l’image est un mineur.
Les animaux sont apparentés aux biens car ils sont la propriété de leurs maîtres. Depuis un arrêté de 2004, la loi précise que le propriétaire d’un bien ne dispose pas d’un droit exclusif sur l’image de celui-ci. un propriétaire ne peut empêcher une prise de vue, sauf si elle implique une violation de son espace privé. En revanche, dans un second temps, il peut porter plainte s’il juge que la publication d’une image lui a causé des désagréments réels.
A plusieurs reprises, j’ai déjà été pris à parti par des agents de la sécurité ou par des responsables de magasins ou de sociétés en m’indiquant que je n’avais pas le droit de photographier leurs vitrines, leurs façades ou encore leurs enseignes. Que dit la loi à ce sujet ?
Nous avons vu précédemment que prendre des photos dans la rue sans les diffuser n’est pas un délit. Ces cas de figure sont liés à la propriété des biens (Article 544 du Code Civil). Les vitrines, les façades ou encore les enseignes sont apparentées aux biens exposés dans l’espace public. Tant que la publication ne cause aucun préjudice et qu’elle n’est pas l’objet principal de l’image, il n’y a aucun délit. Seul le propriétaire et non le gérant ou un agent de la sécurité peuvent porter plainte.
Entre 1994 et 1996, le nombre de plaintes contre les photographes au titre du droit à l’image a doublé. Beaucoup d’abus ont été constatés dans les plaintes déposées et ce phénomène a lentement refait basculer le droit à l’image en faveur des photographes.
Le rôle de la photographie de rue
Une fois pris connaissance du droit, il me semble capital de comprendre l’importance et le rôle de la photographie de rue et de réfléchir sur son utilité sociale.
Les détracteurs de cette discipline photographique ont peut-être une vision un peu trop réductrice et suspicieuse de cette pratique. Ils ont peut-être peurs de l’usage que l’on pourrait faire de ces images. Cette propension à la suspicion vient peut-être du fait que dans l’histoire de l’humanité, la vie privée n’a jamais été autant exposée . L’avènement d’internet et les données personnelles offertes en pâture aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazone, Microsoft) n’est que la partie émergée de l’iceberg. Nous sommes régulièrement filmés à notre insu par un réseaux de vidéosurveillances de plus en plus nombreuses. Le contenu de nos mobiles en disent long sur nous-mêmes, etc.
Il y a donc, d’une part, la peur de ce qui pourrait être fait de ces images, et d’autre part, une incompréhension de l’aspect artistique d’une telle pratique. De plus, l’arrivée récente de la culture procédurière américaine n’arrange rien. Nous sommes très éloignés de la société où vivaient les premiers photographes de rue comme par exemple Brassaï, Doisneau ou Henri Cartier-Bresson.
Tous ces photographes de rue, connus de leur vivant ou après leur mort, ont laissé des témoignages essentiels de la vie quotidienne à leur époque. Les photographes de rue ont participé à nourrir l’histoire sociale en témoignant de l’esprit de leur époque et ils continuent à le faire malgré les écueils qu’ils rencontrent. Mais il y a aussi de l’humanisme à vouloir photographier l’humain. Ne l’oublions pas !
Au fait, qui sont les photographes de rue ? En dehors de quelques photographes connus et reconnus de leur vivant comme Brassaï (1899-1984), Robert Franck (1924-2019), Henri Cartier-Bresson (1908-2004), Robert Doisneau (1912-1994), Joel Meyerowitz (né en 1938), Martin Parr (né en 1952), Khalik Allah (né en 1985), etc., il y en a une myriade d’autres comme vous et moi qui ne sont pas connus du grand public.
Prenons l’exemple de Vivian Maier (1926-2009), une nounou de Chicago, qui fût découverte après sa mort par le grand public en 2012 grâce au livre de John Maloof « Vivian Maier, Street Photographer » et qui est reconnue aujourd’hui comme étant une grande photographe de rue.
La grande majorité des photographes de rue ne vivent pas de leurs photos ou alors par des moyens détournés comme la formation. Si je cherchais à vivre de la photographie, alors je ferais plutôt du reportage, du mariage, du paysage, du sport mais certainement pas de la rue. Je pratique ce genre photographique avant tout pour le jeu, le défi, le plaisir artistique et parce que le genre humain me fascine. Parce qu’après des heures passées sur le terrain à enchainer photos ratées sur photos ratées, une pépite tombe du ciel et provoque une onde de joie qui efface d’un seul coup tous les échecs passés. Parce que la magie de l’instant décisif gravé à jamais dans une image est comme laisser une trace à travers le temps fugace et effleurer la notion d’éternité peut-être. Parce que j’aime raconter des histoires. Parce que j’aime découvrir ma vision du monde sur papier ou sur écran et partager cela avec autrui. Enfin, parce que c’est un merveilleux témoignage pour les générations à venir. En regardant une photo ancienne, n’avez-vous jamais ressenti une émotion et n’a-t-elle pas susciter une réflexion sur notre mode de vie actuelle ?
A ce stade, vous ne devriez plus avoir de doute tant sur l’utilité de la photographie de rue que sa place dans l’art. Certains photographes de rue n’ont-ils pas aussi été primés par de prestigieuses fondations comme le fameux prix de la Fondation Hasselblad ? Le gagnant touche autour de 35000 euros pour réaliser un projet et est accompagné pour produire une exposition, un livre et bénéficie d’une visibilité internationale. Tous les établissements faisant autorité dans la photographie ont laissé une place à la photographie de rue et reconnu sa valeur artistique comme par exemple la Maison Européenne de la photographie, le Centre Pompidou, ou encore les rencontres d’Arles.
Aspect éthique
Vous l’aurez compris, si vous photographiez dans l’espace public à des fins non-commerciales, la jurisprudence considère que le droit à la créativité artistique est supérieur au respect de la vie privée à condition lors de la diffusion de ces images de ne pas causer un préjudice grave aux personnes clairement identifiables.
En tous cas, personne n’a le droit de vous demander d’effacer les photos prises dans un espace public.
En considérant le cadre purement légal tous les conseils du type « vous devez demander l’autorisation avant de photographier quelqu’un dans la rue » sont totalement infondés.
Ceci dit, je crois que le bon sens doit toujours être privilégié. Si quelqu’un me voit le photographier dans la rue et me demande de supprimer la photo, je lui expliquerais ma démarche pour qu’il comprenne que je ne fais rien de mal, mais s’il insiste alors je supprimerais sans doute la photo. Je crois que l’éthique doit prévaloir sur tout le reste. Je ne souhaite en aucun cas contrarier les personne que je photographie à leur insu. Et si je suis discret au point de n’être pas vu, ce n’est pas par sournoiserie mais parce que mon but est de capter une scène authentique du quotidien urbain. Je ne me cache pas pour voler l’âme des gens mais bien pour capturer un instant pris sur le vif et qui reflète la vraie vie. La photographie de rue telle que je la pratique cherche à capter la nature humaine dans son environnement. Il faut donc la percevoir au sens large du terme. La personne que je photographie représente l’humain. Je ne me focalise pas sur sa personne parce que je m’intéresse à elle mais plutôt pour raconter une histoire dont chaque photo représente la pièce d’un puzzle géant.
Ce qui chapeaute ma démarche est avant tout le respect. Je prends la photo et je réfléchis toujours à l’impact qu’elle peut avoir avant de la publier. Par principe, je ne diffuse pas des personnes à la posture ou à l’expression du visages disgracieuses. J’utilise souvent l’humour à travers mes photos pour montrer une situation surréaliste, cocasse ou décalée mais jamais pour me moquer d’une personne. Encore une fois, il faut percevoir ma démarche au sens large. Je crois qu’en tant que photographe, il faudrait davantage s’interroger sur ce qu’on a le droit de faire vis-à-vis de l’autre, dans un rapport de respect et non de législation. Il est vrai que la culture influe sur le geste photographique. Il y aurait tant à dire à ce sujet en passant en revue, d’un pays à l’autre, les différents comportements face à la culture de l’image qu’un article entier pourrait y être consacré.
Conclusion
Le photographe de rue est forcément tributaire des lois qui encadrent sa pratique et qui ne cessent d’évoluer mais il est également influencé par la culture de l’image et le rapport qu’on les gens avec le fait d’être photographié dans l’espace public. Nous sommes loin de l’époque de Brassaï ou Doisneau où le photographe de rue pouvait librement photographier et exposer son travail. Mais nous sommes encore fort heureusement très éloignés des régimes politiques autoritaires. Soyons tout de même prudents car tout peu basculer très vite.
Depuis l’affaire François-Marie Banier en 2008 contre la plaignante Isabelle Chastenet de Puységur, le droit à la création artistique dans l’espace public prime sur le fameux « droit à l’image » que certains brandissent comme une formule magique. A nous, photographes, de prendre le temps d’expliquer ce que nous faisons aux personnes curieuses et ouvertes d’esprit. C’est à ce prix-là que nous pourrons changer la vision de la photographie de rue dans l’imaginaire collectif. Evidemment, inutile de perdre son temps avec celles et ceux doués de mauvaise foi. Malgré certains arguments juridiques avérés et certains établissements notoires faisant autorité en légitimant la photo de rue comme étant un art à part entière, il y aura toujours d’indécrottables détracteurs. On a beau savoir que la terre est ronde, il existera toujours des gens affirmants qu’elle est plate.
Pour conclure, je récapitule quelques points importants :
Dans la rue qui est un espace public, nous pouvons prendre des photos sans être inquiétés par la loi. Prenez des photos et réfléchissez après ! C’est la diffusion qui peut être sujet à débat mais jamais la prise de vue. Le juge considère que le droit à la création est supérieur au respect de la vie privée à condition qu’il ne provoque aucun préjudice grave avéré à la personne photographiée. En effet, la jurisprudence française défend la création artistique et son importance dans la société. Personne ne peut vous obliger à supprimer une photo que vous venez de prendre dans la rue. Le plus important est de faire appel à votre bon sens et votre éthique.
Dans la photo de rue, il y a une multitude d’approche différente. Certains photographes comme Bruce Gilden pratique le portrait de rue avec un flash. Cela peut paraître très intrusif voire même agressif par les personne qui ne cherche pas à comprendre sa démarche. D’autres préfèrent une approche plus discrète. En ce qui me concerne, j’aime me fondre dans la foule comme un caméléon pour capter des scènes spontanées et des comportements naturels. Il faut le dire, la plupart du temps les interactions sont positives. Il m’est même déjà arrivé d’offrir un tirage à une soeur qui avait été honorée d’avoir été photographiée.
J’en garde un souvenir impérissable. Plusieurs années après que la photo ait été réalisée, soeur Marthe pris rendez-vous avec moi par l’intermédiaire d’une personne qui suit mon travail photographique. Elle me réserva un accueil très humain et chaleureux en me demandant pourquoi je m’étais intéressé à une personne aussi insignifiante qu’elle. Elle était emprunte de beaucoup d’humilité et de curiosité.
La rue réserve bien des surprises. Et pas que des mauvaises au contraire.
En espérant que cet article est contribué à une meilleure compréhension du sujet, je vous remercie de m’avoir lu jusqu’au bout. N’hésitez pas à laisser un commentaire.
Liste de quelques articles intéressants pour approfondir le sujet du droit à l’image :
Intercité : le making off de Thomas Hammoudi
Vous avez le droit de prendre les gens dans la rue ? de Thomas Hammoudi
Droit à l’image et photo de rue (partie 1) par Focus Numérique
Droit à l’image et photo de rue (partie 2) par Focus Numérique
Blog Droit et Photographie de Joëlle Verbrugge
J’ai rédigé un document PDF sur une page reprenant toutes les informations essentielles à retenir que vous pouvez télécharger ci-dessous.
Bravo pour la clarté de cet article sur un sujet aussi épineux !
L’éclairage apporte vraiment une meilleure compréhension des enjeux, et peut aider à nourrir le débat.
Un article à partager massivement.
Merci pour ce bel article bien documenté et utile !
Merci beaucoup pour ce retour d’impression Valérie ! C’est un sujet aussi important pour le photographe que pour la personne qui aime fréquenter les rues de la ville.
Merci Joan pour votre commentaire. En effet, j’ai consacré du temps pour rédiger cet article et vérifier chaque information.
Merci beaucoup pour cet article qui a encore affiné mes connaissances en la matière. La lecture est très fluide et claire. Objectif atteint 💪
Je note au passage que je ne me souviens pas d’un seul visage et que je ne me suis jamais fait de réflexion esthétique ou sociale concernant une personne que vous avez photographiée tant la situation prise et l’histoire que cette dernière suggère était une évidence.
Photographier l’homme, l’humain et le genre humain dans sa diversité, c’est ce qui fait la richesse artistique et la fertilité de votre travail.
Peut être un jour tomberez vous sur une personne se plaignant d’être noyée dans le genre humain et invisible dans son individualité ?
Une dernière question : comment faites vous savoir si la publication d’une de vos photos ne va pas engendrer un prejudice pour la personne photographiée si vous ne m’informez pas que vous l’avez prise ? Le préjudice pourrait être une présence à un endroit qui ne devrait pas se savoir par ex.
Élisabeth
Bonjour Elisabeth ! Tout d’abord merci d’avoir pris le temps de lire cet article qui contribuera je l’espère à chasser quelques nuages (idées reçues, méconnaissance) dans l’imaginaire collectif.
Pour répondre à votre question, la loi évoque un préjudice grave comme un divorce engendré par une union illégitime ou encore une image dégradante de la personne. Par conséquent, j’évite de publier des personnes qui s’embrassent ou des sans- abris allongés au sol à coté de détritus par exemple. Si la personne photographiée ne devait pas être à l’endroit où je l’ai photographié, je ne pense pas que cela comporte un préjudice grave et je l’invite à éviter les lieux publics si elle souhaite garder l’anonymat. Cette situation ne m’est jamais arrivée. Ceci dit, cette personne peut également croiser quelqu’un qu’elle connait ou être vue. Elle ne peut pas demander aux gens de la rue de rester chez eux pendant qu’elle traverse la ville pour ne pas être reconnue. Dans ce cas-là, qu’elle se déguise car je pense ne pas être responsable du mensonge qui l’anime. J’espère avoir pu répondre à votre questionnement.
Bravo Fabrice!
Donc si je comprends bien, tu devrais demander l’autorisation aux gens apparaissants sur les photos que tu souhaites commercialiser?
Je découvre aussi Bruce Gilden. Génial!
Je n’ai pas une démarche commerciale. Le livre de François-Marie Banier en témoigne. Sinon, il aurait perdu le procès. Un jour, je ferai un article traitant spécifiquement de ce point de vue. Donc du coup, on peut faire un livre photos sans être dans une démarche commerciale. Affaire à suivre… Bruce Gilden est un photographe de rue vraiment à connaitre. Il a un compte Instagram dont voici le lien : https://www.instagram.com/bruce_gilden/
Merci pour ton commentaire Catherine !!!
Un grand merci Fabrice pour l’écriture de cet article et toute la documentation qui le précède .
Un sujet qui pose toujours question il est vrai , alors merci pour tous ces éclaircissements que j’ai beaucoup aimé lire …. Merci !!!!
Bonjour Danielle ! Merci beaucoup pour ce retour d’impression. En effet, c’est une question importante car elle ne s’adresse pas seulement aux photographes qui foulent le pavés mais aussi à toutes celles et ceux qui fréquentent la ville.
Bonjour Fabrice,
Ne différencions diffusion et commercialisation.
Le Droit ne fait pas la différence. Dès lors qu’une photographie quitte le strict domaine personnel (la famille), la diffusion devient litigieuse, qu’elle ait été gratuite (réseaux sociaux, fanzines…) ou commerciale. Dans ce dernier cas, le juge portera un regard différent selon que la commercialisation ait été faite au travers d’un livre (présomption artistique) ou d’un support publicitaire (présomption lucrative, très mal vue).
Ce détail à part, bravo et merci pour cet article d’une grande limpidité.
Bonjour Bernard,
J’aurais bien aimé que vous nous présentiez les textes de loi auxquels vous faites référence. Vous dites que le Droit ne fait pas de différence entre diffusion et commercialisation si je vous ai bien compris. Vous dites que « dès lors qu’une photographie quitte le strict domaine personnel la diffusion devient litigieuse ». « Ce détail » est pourtant le coeur du sujet de cet article. Dois-je vous rappeler que depuis l’affaire François-Marie Banier en 2008, la Cour d’Appel de Paris a prononcé un arrêt qui fait jurisprudence et qui fait primer, lors de la diffusion d’une photographie, le principe de liberté d’expression dans l’espace public sur le respect de la vie privée à condition qu’aucun préjudice grave ne soit avéré. François-Marie Banier a bien diffusé ces images dans un livre proposé à la vente et pourtant le juge lui a donné raison. Joëlle Verbrugge est une avocate spécialisée dans le droit à l’image et elle fournit maintes exemples qui vont dans ce sens. Bref, je ne comprends pas très bien votre commentaire qui semble se contredire par moment mais je vous remercie d’avoir pris le temps de lire mon article que vous trouver « d’une grande limpidité », à ce détail près.
Blog très bien documenté : à ce sujet pour la prise de photos dans la rue, mon voisin qui est cameraman à FR3 m’avait dit un jour, qu’on ne pouvait prendre en photo quelqu’un seulement si ce quelqu’un était d’accord…. et que lors d’une prise de vue, il y a un homme qui lui a demandé de ne pas apparaitre sur les vidéos (émission politique) et qu’il avait du le retirer au montage….(sûrement car c’était politique et qu’il ne voulait pas apparaitre… car le texte sur les droits et devoirs et clair… merci de cet éclairage Fabrice…
Bonjour Joelle ! En effet, je traite principalement du droit à l’image dans le cadre d’une démarche artistique dans l’espace public. Il faut bien différencier la photo de rue et les documentaires. Dans ce dernier cas, le droit est bien différent puisque ce n’est pas une démarche purement artistique. Les journalistes font de plus en plus attention au droit à l’image car il y a une augmentation des plaintes dans ce domaine.
Merci pour votre commentaire Joelle !